Nice Trip

Note d'intention
« Nous souhaitons, Mathieu Desseigne-Ravel et moi-même prolonger, à présent, cette collaboration en développant cette proposition pour en faire un format d’une heure environ et cela pour deux raisons principales. D’abord, le contexte particulier de production de 2017, c’est-à-dire peu de temps de répétition et un format court imposé par la SACD, nous ont laissé avec une certaine frustration concernant le sujet abordé. Ensuite, la diffusion de cette forme courte s’est très souvent retrouvée, de par son format et dans le cadre de soirées composées, à proximité d’autres formes spectaculaires bien éloignées des préoccupations politiques inhérentes à la thématique abordée dans la pièce BÂTARDS.
Nous souhaitons prolonger l’écriture de cette pièce, qui s’intitulera NICE TRIP, au regard d’une actualité toujours vive et soutenue sur ce sujet éminemment politique...puisque, aujourd’hui, plus de 40000 kilomètres de murs frontières contrarient les mobilités humaines d’enfants, de femmes et d’hommes désireux de sauver leur vie et qu’il apparaît plus facile d’agir sur la circulation des personnes que sur celle des capitaux...
Aussi, il nous semble pertinent d’imaginer cette suite en intégrant la présence d’un.e jeune interprète. En effet, les questions du franchissement des limites des territoires, associées aux contraintes et entraves faites au corps qu’elles suscitent, concernent aussi une jeunesse déplacée qui fait la dure expérience de se confronter à ce type de réalités. Des états de corps contraints donc, qui doivent négocier toujours plus, psychiquement et physiquement, ce qu’une volonté adulte a inventé pour dissuader tout appétit de survie et de liberté... Enfin, nous ferons en sorte d’aboutir à une réalisation qui garantisse une facilité de diffusion tant d’un point de vue technique qu’économique.
En effet, nous nous rappelons le contexte particulier de présentation de la pièce au festival d’Avignon en 2017, présentée à 18h30, en plein air, au Jardin de la Vierge. Cette forme courte avait volontairement bénéficié d’un accompagnement technique léger et d’une occupation scénographique qui se résumait à la présence de cinq photographies noir et blanc, de grand format, réalisées par l’artiste photographe Ludovic Alussi. Le sujet de la pièce nécessitera naturellement une sobriété spectaculaire afin de préserver, à travers un parti pris formel très brut, ce que sous-tend en creux ce projet : suggérer plutôt que montrer ce que nous faisons du vivant à présent... Quelle valeur lui accordons-nous, désormais, pour parfois le nier et le négliger à ce point ? »
Michel Schweizer

Biographies

Après un passage au Conservatoire d’Art Dramatique de Bordeaux et des études à l’école des Beaux- Arts de Bordeaux, Michel Schweizer commence à multiplier les expériences dans le champ des arts plastiques et de la danse contemporaine à l’époque où celle-ci est en train d'apparaître. Ses investigations et écrits autour de la performance et du happening l’amènent alors à se confronter publiquement à une assemblée, dans le cadre d’expériences particulières, qu’il choisira de concevoir et d’éprouver entièrement en solo. Il croise alors le travail d’une plasticienne – Aline Ribière – avec laquelle il accepte de retrouver le vis-à-vis de la représentation et commence une collaboration artistique où il devient, le temps d’une performance un "modèle" pour ses créations vestimentaires dites "vêtements de l’Imaginaire" qu’il met en scène. Il rencontre ensuite une chorégraphe, Isabelle Lasserre, avec laquelle il travaillera pendant huit ans de 1986 à 1994. Pour causes de divergences esthétiques et politiques concernant leur activité, leur collaboration artistique cesse en 1995 à un moment où Michel Schweizer se remet en question au point d’envisager la fin de toutes pratiques artistiques et, de fait, une autre activité professionnelle. En 1995 pourtant, il crée le groupuscule la coma et propose une première création très singulière titrée Assanies 1 et 2 (1996 et 1997). C’est en 2000-2001 qu’il crée KINGS puis CHRONICS, la même année, SCAN [More Business – More Money Management] en 2003, BLEIB en 2005, ôQUEENS en 2008, FAUVES en 2010, CARTEL en 2013, PRIMITIFS en 2015, CHEPTEL en 2017, LES DIABLES en 2019, BôPEUPL [Nouvelles du parc humain] en 2021 et NICE TRIP en 2023 avec Mathieu-Desseigne Ravel. Depuis plus de 18 ans, il convoque et organise des communautés provisoires. S’applique à en mesurer les degrés d’épuisement. Ordonne une partition au plus près du réel. Se joue des limites et enjeux relationnels qu’entretiennent l’art, le politique et l’économie. Porte un regard caustique sur la marchandisation de l’individu et du langage. Se pose surtout en organisateur. Provoque la rencontre. Nous invite à partager une expérience dont le bénéfice dépendrait de notre capacité à accueillir l’autre, à lui accorder une place. Cela présupposant ceci : être capable de cultiver la perte plutôt que l’avoir…

Mathieu Desseigne-Ravel est né en 1979 à Avignon. Adolescent, il découvre l’acrobatie et la danse hiphop dans une MJC locale. Il se forme ensuite au Centre National des Arts du Cirque (CNAC) de Châlonsen- Champagne puis intègre les Ballets C de la B d’Alain Platel. En 2006, il rejoint Nabil Hemaïzia et Sylvain Bouillet – deux compagnons d’adolescence – et participe à la vie du Collectif 2 Temps 3 Mouvements. Quand celle-ci prend fin En 2014, Mathieu et Sylvain poursuivent l’aventure avec Lucien Reynes à travers Naïf Production, structure hors standard, sans hiérarchie, qui appréhende la création comme un processus entièrement collectif. Y sont développés des projets communs tels que Je suis fait du bruit des autres (2014), La Mécanique des ombres (2016), La Chair a ses raisons (2017) ou encore Des gestes blancs (2018).